Le VIIIe siècle fut une période d’intenses
conflits entre Francs et Sarrasins. La tradition orale rapporte l’histoire de
dame Carcas, " inventée " pour donner plus d’éclat au
prestige de Charlemagne, grand défenseur de la foi face aux infidèles.
Anachronique et peu réaliste, sans fondements historiques, elle demeure une des
grandes légendes du Languedoc et, comme toute légende, elle est belle,
magnifique et merveilleuse.
Il était une fois…une cité aux limites
de l’empire de Carolus Magnus. :
Cette ville est aux mains des Sarrasins,
leur chef, Balaak, étant mort, c’est son épouse qui prend le commandement de
la place. Aimée et respectée, cette femme d’une grande beauté et d’un
caractère affirmé est appelée " dame Carcas ". Obstiné
à s’imposer face à la menace maure, l’empereur à la barbe fleurie tient
le siège durant cinq longues années. Peu à peu, les assiégés s’épuisent,
les réserves se tarissent et la famine s’installe.
Dame Carcas use d’ingénieux
stratagèmes pour tenir en échec le tout-puissant Charlemagne : les
assiégeants croient voir en haut des murailles de nombreux soldats s’agiter
et leur décocher inlassablement des flèches. En fait, pour dissimuler le
nombre dérisoire de combattants restant encore dans la place, dame Carcas fait
confectionner des mannequins de paille et fait agiter des bonnets multicolores
pour tromper l’ennemi. L’astuce a raison des assaillants qui n’osent s’attaquer
à la cité et perdent espoir devant tant de résistance.
L’hiver rude arrive, il ne reste plus qu’un
maigre cochon et un sac de blé pour nourrir les assiégés. La situation est
désespérée ; aussi, dans une ultime ruse, dame Carcas ordonne que l’on
engraisse le cochon et interpelle Charlemagne du haut de ses remparts
" nous sommes au chaud derrière nos remparts, dans nos maisons, alors
que vous grelottez de froid dans vos tentes : voici donc un cadeau pour
vous ! " et elle fait jeter le cochon du haut des murailles.
Cette opulence apparente a raison du moral des assiégeants et Charlemagne se
résigne donc à lever le camp. Ces artifices étant venus à bout des forces de
Charlemagne, dame Carcas fit sonner les trompes pour fêter sa victoire.
Les hommes de l’empereur à la barbe
fleurie s’écrient " Sire, Carcas te sonne ! ",
Charlemagne tend l’oreille et dit " Carcas sonne, oui,
Carcassonne ! ". Surpris, il revient sur ses pas vers
" Carcassonne ", et l’on vit alors la tour Pinte du
château comtal s’incliner respectueusement devant l’empereur ; dans sa
révérence, elle en perdit même son toit !...
Impressionnée, dame Carcas fait appeler l’empereur
et lui ouvre les portes : soldats et habitants fêtent la conciliation.
Dame Carcas soumet sa ville à l’autorité de Charlemagne, se convertit au
christianisme et reçoit pour époux un preux chevalier :…et ils eurent
beaucoup d’enfants…
Depuis, la tour Pinte s’est redressée
mais n’a jamais plus eu de toiture : pas même Viollet-Le-Duc n’osa
remettre de chapeau à cette illustre tour !
D’ailleurs, si vous venez à
Carcassonne, vous constaterez que tout cela est vrai : la tour Pinte n’a
pas de toiture !...
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